Joe, postier à 300 euros par semaine
Tournées rallongées, cadences accélérées, vitesse de marche chronométrée… Le travail des facteurs britanniques ne cesse de se dégrader sur fond de hausse du chômage.Londres, correspondance.
Appelons-le Joe. Il refuse de révéler sa véritable identité par crainte du harcèlement dont sont victimes les postiers de la part de leur hiérarchie.
Joe donc se lève tous les jours à 4 heures du matin. Sa tournée, dans le quartier résidentiel de Brighton, débute deux heures plus tard et s’achève à 14H10 précises. Pour 40 heures de travail hebdomadaire, Joe touche 280 livres, soit environ 300 euros.
Une sacrée différence de traitement si on le compare avec le salaire perçu par le directeur général de la Royal Mail, Andrew Crozier, qui, en 2008, a empoché 3,6 millions de livres. Et ce, sans compter les 10 millions de livres de bonus que se sont partagés les principaux chefs de l’organisme au titre des « économies » réalisées !
Joe, qui travaille depuis douze ans, nous a confié la solidarité exprimée par les usagers de la poste rencontrés lors de sa tournée. Joe raconte également combien son travail prend une tournure tragique, notamment dans les quartiers pauvres, où les personnes dépendantes des aides sociales vilipendent le postier si le chèque hebdomadaire n’arrive pas à temps.
Dans tous les centres de tri, les lieux de collecte et de livraison, la grève de la semaine dernière a été remarquablement suivie. Une manière de faire corps face aux restructurations à l’œuvre. Au nom de la maîtrise des dépenses, ils doivent travailler plus ; les tournées ont été rallongées, et la cadence accélérée, la vitesse de marche exigée étant scientifiquement calculée !
La direction ne cache pas qu’elle souhaite autant que possible remplacer les contrats à temps plein par des temps partiels.
La semaine dernière, elle a annoncé qu’elle comptait embaucher 30.000 personnes pour la période d’avant Noël afin de combler, selon elle, les retards accumulés par les grèves. Des travailleurs corvéables à merci que la direction trouvera sans problème dans un contexte social miné par un taux de chômage de 8%.
Pour Billy Hayes, le secrétaire général du syndicat des postiers, le CWU, il ne fait aucun doute que la direction « essaie de briser le pouvoir du syndicat et son influence sur les lieux de travail ».
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